C’est le 23 décembre 1986, deux jours avant noël, que l’archevêque Martin John Mwaipopo annonça à sa congrégation qu’il quittait le christianisme pour l’Islam. La congrégation fut tellement paralysée par le choc de la nouvelle, que son administrateur se leva de son siège, ferma les portes et les fenêtres et déclara aux membres de l’église que l’esprit de l’archevêque était perturbé c’est-à-dire qu’il était devenu fou. Comment pourrait-il dire ou penser quelque chose d’autre quand, seulement quelques minutes plutôt, l’homme avait sorti ses instruments de musique et avait chanté d’une manière tellement émouvante pour les membres de l’église ? Ils étaient loin de se douter que l’archevêque avait déjà pris dans son cœur une décision qui allait les choquer, et que ces réjouissances étaient uniquement une fête d’adieu. Mais la réaction des membres de la congrégation fut aussi choquante ! Ils ont appelé la police pour arrêter cet homme ‘fou’. On le garda en prison jusqu’à minuit, lorsque le Cheikh Ahmed Sheik, l’homme qui l’avait initié à l’Islam, paya sa caution.
Cet incident n’était que le début d’une série de chocs qui l’attendaient. Le journaliste de Al-Qalam, Simphiwe Sesanti, a parlé à l’ancien archevêque luthérien tanzanien de naissance, Martin John Mwaipopo, qui en embrassant l’Islam fut dès lors connu sous le nom de Al-Hajj Abou Bakr John Mwaipopo. Le mérite doit être attribué au frère zimbabwéen, Sufyan Sabelo, pour avoir attisé la curiosité de cet auteur après avoir entendu le discours de Mwaipopo au ‘Wyebank Islamic Center’ à Durban. Sufyan n’est pas un journaliste à sensation, mais cette nuit-là, il a dû entendre quelque chose, et il ne pouvait tout simplement pas s’empêcher de parler sans cesse de cet homme.
D’ailleurs qui ne verrait pas son intérêt piqué après avoir entendu qu’un archevêque qui avait non seulement obtenu une licence et une maîtrise mais également un doctorat en théologie, s’était ensuite tourné vers l’Islam ? Et puisque les diplômes étrangers sont si importants pour vous, c’est un homme qui a obtenu un diplôme en administration ecclésiastique en Angleterre et les derniers cités à Berlin (Allemagne), un homme qui, avant de devenir musulman, avait été le conseiller international du secrétaire général des églises en Afrique de l’Est, incluant la Tanzanie, le Kenya, L’Ouganda, Le Burundi et certaines régions de l’Ethiopie et de la Somalie. Au Conseil des églises, il a côtoyé l’actuel président de la commission sud-africaine des droits de l’homme, Berney Pityana, et le président de la commission ‘Truth and Reconciliation’, l’évêque Desmond Tutu.
C’est l’histoire d’un homme qui est né il y a 61 ans, le 22 Février à Bukabo, une région qui a des frontières communes avec l’Ouganda. Deux ans après sa naissance, sa famille le baptisa et cinq ans plus tard ils le regardèrent avec fierté devenir un enfant de chœur. En le voyant aider le ministre de l’église et préparer « le corps et le sang du Christ », remplissait les Mwaipopos de fierté, et donna à Mwaipopo, le père, des idées pour l’avenir de son fils. Abou Bakr se rappelle : « Quand plus tard, j’étais en internat, mon père m’écrit me déclarant qu’il voulait me voir devenir prêtre. Dans chaque lettre il écrivait cela. » Mais Mwaipopo avait ses propres idées, il voulait rejoindre les forces de police. Mais à 25 ans, il s’inclina devant la volonté de son père. Contrairement à l’Europe où les enfants peuvent faire ce qu’ils ont envie de faire après l’âge de 21 ans, en Afrique, les enfants apprennent à honorer la volonté de leurs parents aux dépens de la leur. « Mon fils, avant que mes yeux ne se ferment (je meurs) j’aimerais te voir devenir prêtre. » C’est ainsi que le père parla à son fils et c’est ainsi que son fils fut ému au point qu’il se rendit en Angleterre en 1964, pour obtenir un diplôme en administration d’église, et une année plus tard en Allemagne pour obtenir une licence. A son retour, un an plus tard, il fut nommé évêque remplaçant. Plus tard, il retourna pour faire sa maîtrise. « Pendant tout ce temps, je ne faisais que faire les choses sans poser de questions. » Ce fut quand il a commencé son doctorat qu’il commença à remettre les choses en questions. Mwaipopo dit : « J’ai commencé à me dire : il y a le christianisme, l’Islam, le judaïsme, le bouddhisme, chaque religion différente prétendant être la vraie religion. Quelle est la vérité ? Je voulais la vérité. »
Ainsi a commencé sa quête, jusqu’à ce qu’il la restreigne aux quatre ‘principales’ religions. Il se procura une copie du Coran et devinez quoi ? Il se rappelle : « Quand j’ai ouvert le Coran, les premiers versets que je vis étaient (sens des versets) :
« Dis : « Il est Allah, Unique. Allah, Le Seul à être imploré pour ce que nous désirons. Il n’a jamais engendré, n’a pas été engendré non plus. Et nul n’est égal à Lui » (Coran 112/1-4) »
Ce fut à ce moment que les graines de l’Islam, inconnues pour lui, furent semées en lui. C’est à ce moment-là qu’il découvrit que le Coran était le seul livre d’Ecritures Saintes qui n’avait pas été altéré par les êtres humains depuis sa révélation. « Et en concluant ma thèse de doctorat je l’ai déclaré. Peu m’importait qu’ils m’octroient mon doctorat ou pas, c’était la vérité et c’est la vérité que je cherchais. » Dans cet état d’esprit, il appela son professeur ‘bien-aimé’ Van Burger. Il dit : « J’ai fermé la porte, je l’ai regardé dans les yeux et je lui ai demandé : ‘De toutes les religions du monde, laquelle est la vraie ?’ » Il répondit : ‘L’Islam’ Je lui ai alors demandé : ‘Pourquoi n’êtes-vous donc pas musulman ?’ Il me dit : ‘premièrement, je déteste les Arabes, et deuxièmement, vois-tu tout ce luxe? Crois-tu que je délaisserais tout cela pour l’Islam ?’ Quand j’ai pensé à sa réponse, j’ai pensé également à ma propre situation » se rappela Mwaipopo. Sa mission, ses voitures, tout cela lui vint à l’esprit. Non il ne pouvait pas embrasser l’Islam, et pendant une année entière il ôta cela de son esprit.
Mais quand les rêves le hantaient, les versets du Coran ne cessaient d’apparaître et des gens vêtus de blanc ne cessaient de venir, « plus particulièrement le vendredi », jusqu’à ce qu’il n’en puisse plus. Ainsi, le 22 décembre, il embrassa l’Islam de manière officielle. Ces rêves qui l’avaient guidé, n’étaient-ils pas le résultat de la nature superstitieuse des Africains ? Il nous dit : « Non, je ne crois pas que tous les rêves soient mauvais. Il y a ceux qui te guident vers le droit chemin, et ceux qui ne le font pas, et ceux-là, en particulier m’ont guidé vers le droit chemin vers l’Islam. »
En conséquence de cela, l’Eglise lui confisqua sa maison et sa voiture. Sa femme, ne pouvant pas le supporter, fit ses bagages, prit ses enfants et s’en alla , malgré le fait que Mwaipopo l’ait assurée qu’elle n’était pas obligée de devenir musulmane. Quand il rendit visite à ses parents, ils avaient également entendu parler de l’histoire. Mwaipopo se rappela : « Mon père me dit de renoncer à l’Islam et ma mère dit qu’elle ne voulait pas ‘m’entendre dire des balivernes » Il se retrouvait tout seul. Interrogé à propos de ses sentiments envers ses parents, il dit qu’il leur a pardonné, qu’il avait eu le temps de se réconcilier avec son père avant de partir vers l’autre monde. Il déclara : « Ils étaient juste des personnes âgées qui ne savaient rien ; ils n’étaient même pas capables de lire la Bible… tout ce qu’ils savaient, c’était ce qu’avait lu le prêtre devant eux» Après avoir demandé de passer la nuit chez eux, le lendemain il commença son voyage vers le pays d’origine de sa famille, Kyela, près de la frontière entre la Tanzanie et le Malawi. Ses parents s’étaient installés à Kiola (Morogoro). Durant son voyage, il fut retenu à Busale par une famille qui vendait de la bière faite à la maison. C’est là qu’il rencontra sa future femme, une nonne catholique qui portait le nom de sœur Gertrude Kibweya, connue maintenant sous le nom de sœur Zainab. C’est avec elle qu’il voyagea à Kyela, où le vieil homme, qui l’avait hébergé la veille, lui dit que c’est là qu’il trouverait d’autres musulmans. Mais avant cela, le matin de cette journée, il avait fait l’appel à la prière (Adhân), ce qui poussa les villageois à sortir et à demander à son hôte pourquoi il hébergeait chez lui un fou. « Ce fut la nonne qui expliqua que je n’étais pas fou mais un musulman. » dit-il. Ce fut la même nonne qui aida Mwaipopo, plus tard et grâce à la conversation qu’il avait eu avec elle, à payer ses frais d’hospitalisation quand il tomba gravement malade. La suite de l’histoire, c’est qu’il lui avait demandé pourquoi elle portait un crucifix autour du cou ; et elle de répondre que c’était parce que Jésus y avait été crucifié. Il dit alors « Mais supposons que votre père ait été tué par une arme, vous promèneriez-vous avec cette arme sur la poitrine ? » Mmmmh. Ceci laissa la nonne pensive, et donna à son esprit matière à réflexion, et quand, plus tard, l’ancien archevêque proposa le mariage à la nonne, elle répondit par l’affirmative. Ils se marièrent en secret et quatre semaines plus tard, elle écrivit une lettre à son clergé les informant de sa renonciation à son engagement. Quand ils atteignirent le domicile du vieil homme qui les avait hébergés, on leur conseilla de le quitter car, ayant appris ce mariage, ‘le vieil homme chargea son arme’, et le père de la nonne était enragé et ‘aussi féroce qu’un lion’.
De la grande demeure de l’évêque, Mwaipopo déménagea dans une maison en argile qu’il avait construite lui-même. Après avoir gagné sa vie en tant que conseiller international du secrétaire général des églises en Afrique de l’Est, il commença à gagner sa vie en tant que bûcheron ou laboureur des terres de certaines personnes. Quand il ne faisait pas cela, il prêchait l’Islam en public. Ceci entraîna une série de courts séjours en prison, étant accusé de blasphémer le christianisme.
En 1988, pendant le Hajj, une tragédie s’abattit sur lui. On fit exploser sa maison et par conséquent, ses enfants, des triplets, périrent. « Un évêque, dont la mère et ma propre mère avait le même père, était impliqué dans l’attentat. » se rappelle Mwaipopo. Il dit qu’au lieu de le démoraliser, ceci a eu l’effet contraire, comme le nombre de personnes embrassant l’Islam augmentait, y compris son beau-père. En 1992, il fut emprisonné pendant dix mois ainsi que 70 adeptes, accusés de trahison. Ceci eut lieu après que quelques magasins où l’on vendait du porc, à l’encontre desquels il avait parlé, avaient explosé. Il a admis avoir dénoncé leur existence, déclarant que d’un point de vue de la Constitution, depuis 1913, il y avait une loi interdisant les bars, les clubs et le commerce du porc à Dar-Assalam, Tanga, Mafia, Lindi et Kigoma. Heureusement pour lui, il fut acquitté et juste après, il s’envola vers la Zambie pour s’y exiler après qu’il fut averti d’’un complot visant à le tuer. Il dit que le jour même où il fut libéré, la police revint pour l’arrêter encore une fois. Et devinez quoi ? Mwaipopo a déclaré que : « Des femmes ont refusé et elles ont dit qu’elles s’opposeraient physiquement à mon arrestation par la police. Ce sont également des femmes qui m’ont aidé à passer les frontières inaperçu. Elles m’avaient habillé en femme. » C’est l’une des raisons pour lesquelles il admire les femmes. « En Islam, les femmes doivent obtenir un statut élevé, elles doivent être éduquées de la meilleure manière qui soit. Autrement comment la femme pourra-t-elle comprendre pourquoi l’homme prend plus d’une seule épouse… ce fut ma femme, Zainab, qui m’a proposé de me marier avec ma seconde épouse, Shela, (son amie), quand elle a dû partir faire des études islamiques à l’étranger. » Ce sont les paroles de l’évêque. Vraiment ? Pour les musulmans, le message du Hadj Abou Bakr Mwaipopo est : « On fait la guerre à l’Islam… submergez le monde de littérature (islamique). Actuellement, les musulmans se sont habitués à se sentir honteux à être considérés comme des fondamentalistes. Les musulmans doivent cesser leurs penchants individualistes. Ils doivent avoir un esprit communautariste. Vous devez défendre votre voisin si vous voulez être en sécurité » déclara-t-il, encourageant également les musulmans à être courageux, donnant en référence ‘the Islamic Propagation Centre International’ de Ahmed Deedat. « Cet homme n’a pas de formation académique, mais regardez la manière dont il a propagé l’Islam. »
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